La loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 pour la protection du pouvoir d’achat, parue au JO dès le lendemain, prévoit un certain nombre de mesures d’urgence en matière immobilière.

Pour les bénéficiaires des APL

 

Afin de compenser la hausse des loyers consécutives à leur revalorisation annuelle à l’IRL (par ailleurs plafonnée à 3,5%), l’aide personnalisée au logement est revalorisée à hauteur de 3,5% et ce, rétroactivement au 1er juillet 2022.

Une mesure qui permettra d’amortir la hausse historique des frais que devront assumer les étudiants à la rentrée (sur ce point, voir https://www.lemonde.fr/economie/article/2022/08/16/une-rentree-etudiante-minee-par-la-hausse-des-prix_6138161_3234.html )

Pour les locataires d’un bien à usage d’habitation

 

  • Le bouclier-loyer

Le plafonnement de l’indexation annuelle à l’IRL des loyers des baux d’habitation est prévu en ces termes : « pour la fixation des indices de référence des loyers entre le troisième trimestre de l’année 2022 et le deuxième trimestre de l’année 2023, la variation en glissement annuel de l’indice de référence des loyers ne peut excéder 3,5 % » (article 12.II).

Ce plafonnement est ramené à 2,5% dans les pays d’outre-mer et en Corse après décision de l’Assemblée Corse.

Entre le 1er juillet 2022 et le 30 juin 2023, les indexations des loyers sur la base de l’IRL ne pourront donc pas aboutir à une augmentation de plus de 3,5%.

L’IRL du 2ème trimestre 2022 (paru mi juillet) a augmenté de 3,6% et l’IRL du 3ème trimestre sera publié mi-octobre.

Les bailleurs ayant pratiqué une indexation sur la base de l’IRL du 2ème trimestre 2022, entre le 15 juillet 2022 et la date de publication de la loi – le 17 août – risquent donc de devoir réajuster à la baisse leur demande de révision.

  • La neutralisation du complément de loyer des logements « inconfortables »

Dans le cadre du dispositif d’encadrement des loyers (tel que précisé à l’article 140 de la loi ELAN), la loi prévoit qu’« aucun complément de loyer ne peut être appliqué lorsque le logement présente une ou plusieurs des caractéristiques suivantes : des sanitaires sur le palier, des signes d’humidité sur certains murs, un niveau de performance énergétique de classe F ou de classe G au sens de l’article L. 173-1-1 du code de la construction et de l’habitation, des fenêtres laissant anormalement passer l’air hors grille de ventilation, un vis-à-vis à moins de dix mètres, des infiltrations ou des inondations provenant de l’extérieur du logement, des problèmes d’évacuation d’eau au cours des trois derniers mois, une installation électrique dégradée ou une mauvaise exposition de la pièce principale » (article 13).

De biens bonnes intentions qui risquent néanmoins de générer beaucoup de contentieux.

Des signes d’humidité sur certains murs ? Lesquels ?

Une installation électrique dégradée ? Une installation qui n’est pas aux normes est-elle nécessairement dégradée ?

Quant à la mauvaise exposition de la pièce principale…. l’on peut difficilement faire plus vague. S’agit-il d’une pièce qui a un vis-à-vis de moins de dix mètres ?

Ou le complément de loyer est-il également neutralisé lorsqu’une chambre présente également un vis-à-vis de moins de huit mètres ?

Quid par ailleurs du logement particulièrement mal isolé au niveau phonétique, qui peut également être très inconfortable, sans pour autant figurer dans la liste ?

Pour les TPE titulaires d’un bail commercial

 

Les titulaires d’un bail commercial bénéficient également d’un « bouclier-loyer ».

La variation annuelle de l’indice des loyers commerciaux prise en compte pour la révision du loyer applicable aux petites et moyennes entreprises ne peut excéder 3,5 % pour les trimestres compris entre le deuxième trimestre 2022 et le premier trimestre 2023. Le plafonnement de la variation annuelle est définitivement acquis et la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision postérieure ne peut prendre en compte la part de variation de l’indice des loyers commerciaux supérieure à 3,5 % sur cette même période.
Les petites et moyennes entreprises mentionnées par le texte sont celles qui répondent à la définition de l’annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d’aide compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité.

Les mesures prises au soutien des intérêts des locataires (baux d’habitation, surtout, baux commerciaux, dans une très faible mesure), censées être urgentes ont surtout été rédigées à la hâte.

A l’instar des lois récentes censées protéger les locataires et inciter les propriétaires à réaliser des travaux de performance énergétique, la loi sur la protection du pouvoir d’achat instaure des mesures dont les contours ne pourront être dessinés qu’au fil des contentieux qui ne manqueront pas de survenir.

En l’attente, propriétaires et locataires subiront les effets de ces mesures pourtant présentées comme étant urgentes à mettre en oeuvre.